Il faut bien l'avouer, parfois quand on ecrit un blog, surtout quand on l'a commence depuis des annees, on peut avoir tendance a vouloir arrondir les coins et a ne parler que des bons cotes, ce qui peut faire penser au lecteur que notre vie ici est toujours un long fleuve tranquille, une vie sans soucis.
Et bien rassurez-vous, cela n'est pas le cas ! Je pense pouvoir dire en mon nom et en celui de Frank que les temps ont ete tres difficiles pour nous ces derniers mois, et que nous commencons peut etre juste a entrevoir la sortie du tunnel, mais il va encore falloir se battre un peu. Comment ca, me direz vous ? En fait, c'est un Mea Culpa, je vous ai jusqu'ici epargne les details de notre vie les plus croustillants, mais pas forcement les plus "glitter" (paillettes).
Tout a commence l'annee derniere, quand j'ai annonce a mon boulot que j'etais enceinte d'un troisieme enfant, et que l'un de mes superieurs au travail, refermant la porte de son bureau derriere lui, m'a dit "Garance, tu sais comment c'est, officiellement ta grossesse ne va rien changer, mais dans les faits, on sait tous comment les choses se passent." Depuis ce jour la, ca a ete la deprime. En contrat de consultante, donc payee a l'heure, tomber enceinte me garantissait une chose: J'allais perdre mon emploi dans les mois a venir.
Pour amortir le choc qui se preparait et mettre le plus d'economies possibles de cote, j'ai travaille jusqu'a semaine 39, soit jusqu'a 10 jours avant mon accouchement. Je dois admettre que vers la fin, je n'etais plus trop productive ni tres concentree, mais que cela etait comme pour moi une revanche anticipee: Ah oui, vous allez me virer, et bien soit, payez moi jusqu'au bout. Les dernieres semaines je les ai passees assises sur une balle de gym devant un ordi, avec un ventilateur toujours rive sur moi et avec mon sac de maternite dans le coffre de la voiture, et un plan accouchement en place avec mes collegues directs. En meme temps, avec le recul, avec attitude defiante j'y ai aussi un peu laisse ma peau !
Une semaine apres mon accouchement, je recevais a la maison une boite avec toutes mes affaires personnelles et professionnelles, on m'avait liquidee et remplacee aussitot par un ingenieur des eaux. A bien y reflechir, je comprends mieux pourquoi mon ancienne boite n'a que 10% de femmes a tout casser, et pourquoi la moitie d'entre elles sont payees a l'heure, sans contrat, sous couvert hypocrite de "On ne trouve pas de femmes qualifiees".
Ayant accouche et etant assez fatiguee (la maternite me renvoyant a la maison le lendemain de mon accouchement, faute de lits disponibles) je tente de m'occupper de Hugo du mieux possible et de ne pas penser aux consequences professionnelles d'avoir voulu un troisieme enfant.
Dans la foulee, une catstrophe arrive: Le parti liberal australien est elu au pouvoir. Liberal, chretien, aux valeurs copnservatrices, de vrais C %#@$ rds si vous voulez mon avis. Le parti liberal, mene par Tony Abott, s'engange a detruire des milliers d'emplois direct dans le secteur public a Canberra. Canberra etant la capitale administrative de l'Australie, la ville vit essentiellement du service public, qui fait a son tour vivre plein d'entreprises privees. Le lendemain des elections, c'est la panique. Les budgets de recrutement sont geles dans toutes les branches du service public, et beucoup de gens en contrat ou en CDD se retrouvent comme moi progressivement sans emploi. Les deux grandes universites de Canberra licencient aussi a tour de bras.
Quelques mois se sont passes, mais le marche de l'emploi est toujours aussi critique, et le moral des gens touches de pres ou de loin par la politique du Liberal party est en baisse. Les maisons commencent a perdre de la valeur et les petits commerces galerent. Beacoup predisent deux annees a venir tres sombres pour l'economie de Canberra.
Autour de nous, beaucoup de gens songent a partir.
Voici donc a peu pres 6 mois que je cherche un emploi, sans succes. Apres avoir postule on me repond souvent que le poste a tout simplement disparu ! Heureusement, mes anciens contacts professionnels m'ont donne quelques heures de travail a l'universite de Canberra comme tutrice en design, et je vais redonner quelques cours de francais le samdei. Frank, quand a lui, doit travailler a plein temps et faire des heures en plus comme consultant pour son ancienne boite privee. Mais malheureusement cela ne suffit pas a payer toutes les factures. Je vais donc tous les deux jours a une cooperative pour obtenir de la nourriture soit gratuite soit a moindre cout, ce qui nous permet de tenir et de garder une partie du budget bouffe pour les chaussures des enfants, le materiel scolaire.... Je sais maintenant ce que signifie ne pas pouvoir joindre les deux bouts.Nous avons du annuler els cours de natation et de piano d'Elliot, ca me brise vraiment le coeur, mais on n'a pas le choix pour l'instant. L'Australie, il faut le dire, c'est super quand on a du travail, mais quand l'un des deux perd son emploi, on passe tres vite de "aise" a pauvre, sans transition aucune car il n'y a aucune aide, ou presque. Cela fait un choc quand on a ete habitue a etre assiste en France.
Alors on garde espoir. Peut etre cette annee arriverai-je a retrouver un vrai emploi quelque part, ce qui nous sortira d'affaire.
En attendant, pour ne pas laisser de trou dans mon CV, je me suis inscrite a un cours a l' Universite Catholique Australienne. Je vais etudier un an pour avoir le droit de devenir prof dans les lycees. Pour cela il m'a fallu repasser pour la troisime fois en 7 ans un test d'anglais, le IELTS car le test perime au bout de deux ans....heureusement mon score est assez bon pour avoir le droit d'etudier, mais ca a ete serre.
Enfin, en general quand une mauvaise nouvelle arrive les autres suivent: Depuis juillet dernier je souffre de maux de ventres qui ne passent pas. J'ai ete traitee pour trois infections mais il me faut passer des tests plus pousses a l'hopital car la douleur est permanente. J'en ai perdu le sommeil et le moral. Hors ici, pour obtenir un RDV a l'hopital public c'est la galere. Cela faisait deux mois que j'attendais un rendez vous avec un specialiste quand j'ai craque, les ai appele, et ils m'ont dit que le docteur ne travaille plus a l'hopital et que de toutes facon ils on perdu le fax de mon docteur envoye en novembre dernier. Je suis donc repartie pour plusieurs semaines d'attente, dans la douleur, juste pour avoir un premier RDV dans le public. Je suis devenue intolerente a presque tout, en gros, j'en suis au point dene plus trop manger pour ne pas avoir a trop digerer. Les depassements d'honoraires pour aller voir un sepcialiste dans le secteur prive sont tels, que nous ne pouvons pas nous permettre la depense en ce moment.
Dans tout ce decor assez morose, on a la chance de fonctionner en equipe, Frank et moi, de se supporter et d'avoir les enfants. Le quotidien n'est pas simple, le moral est assez bas (du moins le mien), mais au moins on sait qu'on a deja beaucoup, et que des que j'aurai trouve un emploi, les choses devraient s'arranger.
Enfin, Frank est parti hier a Adelaide pour une conference pendant 5 jours. Je reste avec les triplettes a la maison, mais a partir de demain lundi tout va s'accelerer, Elliot rentrant au CE1, et Jasper et Hugo allant a la meme creche. Je me demande variment ce que 2014 nous reserve, affaire a suivre...